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Par-Dessus le PERIPH | Que reste-t-il de la BANLIEUE ROUGE ?

 

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Que reste-t-il de la banlieu rouge ? Ivry-sur-Seine, Villejuif, Vitry. Par-dessus le périph. Le 13 du mois, le magazine indépendant du 13e arrondissement de Paris

« Ce qu’il reste des banlieues rouges ! » L’expression a fait bondir les élus communistes interrogés. «Mais les banlieues rouges, c’est pas fini ! » Il faut dire que le sujet est sensible, avec l’érosion des votes PC et la défaite du député Gosnat aux dernières législatives. En cette époque paradoxale où le Front de gauche atteint des sommets mais où le PC poursuit son déclin, le moment est peut-être venu de se poser la question : nos banlieues sont-elles encore rouges ?

 

Qu’on se balade à Ivry, Vitry ou Villejuif, le patrimoine toponymique est évident : on passe d’une avenue de Stalingrad, à une avenue Karl Marx en traversant une rue Youri Gagarine ou une avenue Lénine. Des bâtiments publics, construits comme des manifestes de la politique communiste trônent encore. Ainsi le collège Karl Marx à Villejuif, situé au numéro 49 de l’avenue Karl Marx bien sûr. Ou encore le stade Lénine à Ivry, où ça ne s’invente pas, joue l’US Stalingrad.

Mais loin de ces détails cocos un peu cocasses, ce qui frappe, c’est le cœur de ces banlieues qui est toujours rouge. La section PC d’Ivry est ainsi une des plus importantes du pays, avec ses 1 050 adhérents - contre 120 au PS, 30 EELV, 30 NPA et 30 à l’UMP dans la même ville. À sa tête, le jeune Mehdi Mokrani, la trentaine, est loin des clichés des vieux communistes croulants. Un peu en avance sur ceux de sa génération dont la conscience politique s’est éveillée le 21 avril 2002, Mehdi adhère au PC juste avant les présidentielles. Après avoir fait ses classes aux Jeunesses communistes, cet Ivryen pur jus a été assistant parlementaire de Pierre Gosnat avant de prendre la tête de la section.

 

Élections, boom des adhésions

Malgré son parcours exemplaire, Mehdi n’est pas un apparatchik et n’est pas toujours tendre avec les positions du PC. « À Ivry on fait 80 adhésions pendant les présidentielles, cela aurait été impossible sans la dynamique du Front de gauche », reconnaît Mehdi. Car quoi qu’on puisse en penser, au PC, le problème n’est pas tant d’attirer de nouvelles têtes : « On recrute beaucoup. Mais on a souvent du mal à les maintenir. » Les différentes vagues de renouvellement ont permis au parti de se rajeunir sans pour autant que les jeunes aient poussé les vieux dehors. Sur la défaite aux législatives, Mehdi relativise : « À Ivry il fallait avoir plus de 35% des voix pour se maintenir, il y a eu une véritable vague rose. » Dans cette ancienne ville ouvrière où l’on vote communiste depuis des générations, la tradition familiale n’a cette fois pas suffi. Pour sa thèse de sociologie, David Gouard (1) a mené un travail de terrain de deux ans sur le passé rouge d’Ivry. Le sociologue a étudié les cités Maurice Thorez et Youri Gagarine, deux quartiers ivryens de longue tradition communiste, histoire d’en savoir plus sur l’évolution du vote PC. Dans ces cités ouvrières où le soutien au PC était très élevé jusqu’aux années 1980, le vote communiste a évolué de façon radicalement opposée. Dans la cité Maurice Thorez, au centre-ville, le soutien au PC s’est maintenu. À l’inverse, le quartier Gagarine avec sa population immigrée vote moins et vote moins PC : « C’est assez représentatif des banlieues rouges avec le rétrécissement du noyau électoral qui soutient le PCF, explique David Gouard. Il s’agit souvent de descendants d’ouvriers qui votaient massivement pour le parti communiste. Maintenant ils sont cadres de la fonction publique, enseignants... »

 

Les succès du communisme municipal

Dans le Val-de-Marne, bastion communiste pendant 80 ans, des communes comme Ivry, Vitry, Villejuif et Gentilly sont dirigées par des maires communistes depuis des décennies. La raison ? L’adhésion de la population à la politique de communisme municipal, un modèle de gestion de la ville avec des élus très proches de leurs administrés. « Les communistes ont mené une politique avec un encadrement assez fort des populations dans les domaines de la santé et du logement dans un premier temps, dans les années 1920. Ils ont construit leur légitimité en politique locale sur les réalisations sociales qui ont directement amélioré la qualité de vie de la classe ouvrière », poursuit le sociologue. Les élus communistes investissent beaucoup dans le sport et la culture, on le voit au nombre important d’équipements culturels. Ivry compte ainsi pas moins de trois théâtres pour une population qui représente moins du tiers de celle du 13e arrondissement.

 

[...]Lire la suite dans Le 13 du Mois #25

 

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Publié par Eloïse Fagard  le 15 Janvier 2013
 

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