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DOSSIER |Prison de la santé - Comment un mythe s’est construit

 

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En 2017, la maison d’arrêt de la Santé passera le cap des 150 ans. Sans ses détenus, évacués pendant cinq ans le temps d’une rénovation plus que nécessaire. C’est l’occasion de revenir sur l’histoire de la plus emblématique des prisons françaises, dont les hauts murs de pierre noircis par la pollution urbaine marquent à jamais l’identité du quartier Croulebarbe.

Comment un mythe s’est construit

Les cellules sont vides, les couloirs silencieux. Depuis fin juillet, la prison de la Santé est en travaux.  Elle ne rouvrira pas avant 2019 et c’est pour cela que nous y avons eu accès une matinée de fin novembre. Les 600 détenus ont été transférés dans d’autres établissements dont Fresnes (Val-de-Marne) et Fleury-Merogis (Essonne). Seul le quartier de semi-liberté reste ouvert (lire page 33). En 2006 déjà, trois blocs, les plus abîmés, avaient été désaffectés.

C’est la première fois que la célèbre maison d’arrêt, la seule encore installée dans Paris, est ainsi évacuée. C’est dire l’ampleur des rénovations en cours. À part l’enceinte, tout va être entièrement reconstruit. Vétuste à l’extrême, avec ses conditions de détention qui ont fait scandale (lire l’entretien avec Véronique Vasseur page 34), la Santé a depuis longtemps cessé d’être le fleuron de modernité qu’elle était lors de son inauguration en 1867.

Un modèle carcéral venu des États-Unis

Sa construction est envisagée dès 1851. Elle doit alors être une réplique de la prison de Mazas, dans le futur 12e arrondissement, le premier établissement bâti sur le principe de l’enfermement cellulaire de jour et de nuit. Depuis 1836, toutes les nouvelles constructions, prisons centrales et départementales, doivent suivre ce modèle dit « pennsylvanien », du nom de l’État américain qui l’a expérimenté pour la première fois. Les autorités considèrent en effet qu’il faut éviter de mettre « les citoyens, peut-être irréprochables, ou qu’une première faute, souvent légère, amène devant la justice, au contact avilissant et corrupteur de criminels endurcis ». (1)

Mais quand le projet est lancé, en 1861, la donne à un peu changé. Certains experts ont dénoncé les effets d’un enfermement absolu sur la santé mentale des détenus. Les tenants du modèle « auburnien » (d’Auburn, en Alabama) plaident pour un isolement nocturne, avec des activités en commun. De plus, le tout cellulaire coûte cher, au point d’avoir empêché les départements de lancer de nouveaux projets. En 1853, un règlement a donc marqué un retour partiel en arrière, en imposant simplement la séparation des catégories pénales (prévenus et condamnés par exemple) et en autorisant la détention en commun. Symbole de cette concession, la Santé combinera les deux systèmes : pennsylvanien pour les prévenus, auburnien pour les condamnés correctionnels d’un an et en-deçà.

[...] La suite du dossier dans le 13 du Mois#46

Publié par Rébecca Khananié, Jérôme Hoff, Mathilde Azerot  le 08 Décembre 2014
 
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