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Vers une solution pour les migrants d'Austerlitz ?

 

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Retour sur… « Les invisibles du quai d’Austerlitz » - Le 13 du Mois n°52 – juin 2015



VERS UNE SOLUTION POUR LES MIGRANTS D'AUSTERLITZ ?

Dans notre dernier numéro, nous évoquions les migrants d'Austerlitz, bien moins visibles que ceux de la Chapelle. Depuis, les médias les ont découverts, un collectif s'est monté et des propositions de relogement pourraient leur être faites prochainement.

En cet après-midi de juin, les bords de Seine résonnent au son des basses du Wanderlust, le bar hype de la Cité de la mode. Des jeunes Parisiens branchés prennent l'apéro à la terrasse, insouciants. À l'étage inférieur, sous leurs yeux, un tout autre spectacle se déroule. La plupart des migrants soudanais, érythréens, tchadiens sont rentrés au camp de tentes sur le quai. Ils attendent la fin de la journée et la distribution de nourriture. Saisissant contraste. À leurs côtés, une dizaine de bénévoles d'associations (Réseau éducation sans frontières RESF, la Cimade, la Ligue des droits de l'homme...), de syndicats (CGT, Solidaires) et de partis (le Parti de gauche, EELV...), qui ont monté un collectif. « Ce qui a été fait à la Chapelle a créé encore plus de problèmes qu'avant, on voulait que les choses se passent différemment ici », lâche Marc Naelten, membre de RESF et coordinateur du collectif.


Des associations – France Terre d'asile, Emmaüs, le Secours catholique – passaient déjà, mais de manière ponctuelle. Le mois dernier, nous n'avions croisé personne. Depuis début juin, ce collectif assure des permanences sur les camps de la Cité de la mode et du pont Charles-de-Gaulle tous les soirs de 18 heures à 20 heures. Distribution de vêtements, suivi médical, nourriture assurée chaque jour par des associations « dédiées », deux représentants par campement désignés, il a permis d'installer un semblant d'organisation. Six WC ont été installés sur le quai. Les vacances arrivant, y aura-t-il assez de bénévoles pour assurer la présence quotidienne ? Rien n'est moins sûr.

Canicule, bruit, ramadan... Les migrants s’accrochent

En attendant, on s'active. Des bénévoles de RESF proposent des cours de français. Cécile et Anne sont les profs improvisés du soir. « Bonjour », « bonsoir », « frère », « sœur », « on leur apprend à se présenter pour un futur rendez-vous, à faire un peu de conversation. Ça les autonomise, et surtout ça crée du lien » témoigne Anne. Chérif, 22 ans, arrivé du Soudan il y a deux mois, prend des notes et répète sérieusement les mots appris. Les « élèves » sont concentrés, mais c'est dur. La canicule qui vient de s'abattre sur Paris, le raffut du bar et l'observance du ramadan pour ces migrants presque tous musulmans compliquent l'exercice. Un peu à l'écart, Tahir, un Tchadien de 23 ans, explique vouloir rester encore « quatre ou cinq mois, apprendre un peu l'anglais » avant de rejoindre Calais et tenter de traverser la Manche. Il supporte mal de dormir « à trois dans une tente, à même le sol ».

Mi-juin, le gouvernement annonçait un plan visant à améliorer la prise en charge des demandeurs d'asile et la création de places supplémentaires en centres d'accueil. Difficile ici d'en percevoir les effets. Le collectif a envoyé un courrier à la Mairie de Paris et à la préfecture pour demander « un hébergement pérenne et des garanties d'accompagnement dans leurs démarches », explique Jean-Marc Wasilewski, présidente de la locale 5e-13e de la Ligue des droits de l'homme. Lettre laissée sans réponse. Le mois dernier, la préfecture annonçait leur expulsion imminente. Début juillet, ce n'était pas fait. « Elle a compris que l'expulsion manu militari n'était pas possible, que l'opinion publique y était hostile, qu'il fallait d'abord assurer des solutions de relogement », explique Yves Contassot, conseiller EELV de Paris. L'écolo affirme que les places existent, il pense savoir qu'un mois d'hébergement pourrait être proposé aux demandeurs d'asile en cours d'instruction. Bien trop peu. Actuellement, il faut compter six mois à un an pour que son dossier soit traité.

 

 

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LES EXPULSÉS DE LA CHAPELLE ACCUEILLIS DANS LE 13e


Après les expulsions successives qui ont défrayé la chronique, des solutions de relogement ont été proposées aux migrants anciennement installés sur le boulevard de la Chapelle (18e). L'association Aurore en accueille 75 à son centre du Loiret, tout près de la BnF. Installés à deux ou trois par studio équipé de WC et de salle de bain, ils ont accès à une salle télé et une laverie. Une prise en charge « dans des conditions dignes, pour qu'ils retrouvent de l'intimité » après des mois de vie à la rue, vante l'association. Quid des migrants d'Austerlitz ? L'association les accueille toujours en journée à sa halte Mazas (12e). Ils peuvent « s'y doucher, laver leurs vêtements, bénéficier d'un suivi médical ». L'association fait savoir qu'il reste des places au centre du Loiret. La balle est dans le camp des pouvoirs publics.

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Publié par Philippe Schaller  le 23 Juillet 2015
 

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