Portrait | Jean Picollec : éditeur de provoc' | Portrait |
Dans le panorama de l’édition du 21e siècle, Jean Picollec, 74 ans, semble d’un autre temps, un fouineur tourmenté, dénicheur engagé et dissident satisfait. Son antre, capharnaüm aux dominantes marron-carton et gris-journal, abrite ses livres, bien ordonnés, eux, sur les étagères. Ils sentent le soufre et, parfois, la poudre. Des documents récupérés de maisons d’édition frileuses (« Je suis l’ambulance... »), au goût de jamais lu, vu ni entendu et de « vous allez voir ce vous allez voir ». Pourvu que ce soit argumenté, Picollec est preneur, sans « aucune limite », comme il dit.
Son plus gros coup : Au nom d’Oussama Ben Laden de Roland Jacquard, sorti le 12 septembre 2001, un hasard. Jean Picollec ne fait pas de calculs de calendrier, sauf lorsque ce dernier est défavorable à ceux qu’il met en cause. En janvier 1981, l’éditeur sort un dossier sur l’affaire de Broglie, du nom d’un député chargé de la campagne de Valéry Giscard d’Estaing en 1974 et assassiné deux ans plus tard. « La maison d’édition d’origine refuse de sortir le livre car Giscard est donné gagnant à la présidentielle. » Lui flaire au contraire le moment en or. Cette singularité, justement, est connue « dans le monde entier », affirme-t-il. C’est vers lui que se tourne l’ambassadeur israélien Freddy Eytan pour publier en France la biographie d’Ariel Sharon, à lui qu’un journaliste algérien emprisonné confie une critique de Bouteflika, c’est encore lui qu’un représentant de la secte Moon choisit pour éditer les mémoires de son gourou, le Coréen Sun Myung Moon. Dans le catalogue 2012, on trouvera Céline, l’infréquentable ? mais aussi Ils ont acheté la presse, enquête sur le pot-pourri médiatico-politico-financier. La manipulation, toile de fond des éditions Picollec.
Dans le milieu, son anti-conformisme l’ostracise : « Manifestement, on ne recherche pas ma compagnie. » Hormis les grosses structures ou les plus spécialisées, peu de librairies font de ses ouvrages leurs têtes de gondole. Une libraire du 13e juge, un peu gênée, que « Picollec n’est pas très progressiste. [...] Lire la suite dans le 13 du Mois # 19
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Publié par Virginie Tauzin le 08 Juin 2012 |