L'édito

Paris dort-il ?

Au mois de mai, deux arbitrages « supra-municipaux » sont intervenus dans le 13e. À Chinatown, l'inspection du travail a rappelé à l'ordre les commerçants asiatiques qui n'ouvriront plus le dimanche. Surtout, la préfecture a pondu un arrêté à la Butte-aux-Cailles qui sonne un peu comme la fin de la récré : plus d'alcool dans la rue de 16 heures à 7 heures du matin.

On peut s'interroger sur la pertinence de ces décisions administratives, où la vox populi est finalement peu de choses. Les deux sujets restent épineux en termes d'intérêt général. Poujadisme versus acharnement des riverains qui désirent faire de Paris un mausolée de tranquillité, la caricature est aisée. Voyez notre dossier sur la Butte page 16 pour vous en faire une idée nuancée.

Cela étant, il faut bien dire que l'arrondissement ne compte pas beaucoup de points d'attraction. La Butte, qui n'est pas Bastille, loin s'en faut, méritait-elle ce coup d'arrêt ? Que dire du plus grand quartier chinois d'Europe, interdit de travailler le dimanche... N'y a-t-il pas là une atteinte au dynamisme qui coule dans les veines d'une communauté et favorise le rayonnement des villes-monde où on la trouve ?

Il est assez frappant de voir les quelques touristes en quête du « Parisian Chinatown » s'arrêter, faute d'indication, aux abords de la place d'Italie. À Montréal -  voyez notre photoreportage page 24 -,  comme partout dans les grandes villes de type anglo-saxon, Chinatown est signalé par une porte monumentale. À Paris, le quartier, pourtant bien plus dense et riche, reste marginalisé.

Cela a probablement à voir avec la peur viscérale du communautarisme qu'entretient la loi de la République. Contre toute logique pratique parfois, contre l'intérêt économique de l'arrondissement aussi. En réaction, la communauté asiatique a décidé de se fédérer pour valoriser son image. Le début d'une prise de conscience ?

Publié par La rédaction  le 22 Avril 2012

Extrait - La visionneuse