C'est la question qui bruisse depuis que « La manif pour tous » a lancé son combat rétrograde contre le mariage gay : pourquoi ces centaines de milliers de personnes n'ont-elles pas plutôt battu le pavé en faveur du « logement pour tous », priorité des priorités actuelles ? C'est sûr que cela aurait eu plus de gueule et plus de classe aussi... À ceci près justement que sur ce combat comme sur bien d'autres, la majorité des citoyens français - dont nous faisons partie - ne se mobilise que ponctuellement. De là à voir dans l'aveuglement civique de ce cortège étrangement bigarré un camouflage délibéré de sa première des Rigides qui possède, avec son Basile de compagnon, un logement social de 173 m² dans le 15e arrondissement, avec vue pleine et entière sur les hauteurs de Paris...
« Aux portes de la Capitale, chante le griot parisien Thomas Pitiot, j'entends des gens qui pleurent / Pas des larmes de Sitcom, de Victoire, de César / Non, rien que de simples larmes de femmes et d'hommes... » De ces brisés de la vie qui reprennent le cours de leur existence grâce à cet amarre indispensable qu'est le logement. Ce logement d'abord d'urgence qui devient ensuite logement de confiance. Parmi ces heureuses maisons anonymes, il y en a une qui a pris le doux nom de Cœur de femmes et dont vous retrouverez dans ce numéro les témoignages forts de celles qu'elle accueille. Parfois aussi, l'institution sait se montrer généreuse, comme Paris-Habitat, ce géant de la gestion du parc social parisien, qui a accepté la transformation de deux de « ses »logements de la rue Henri-Becque en un studio de radio. Cette Radio Erena, voix rebelle et dissonante qui porte, au creux de la Capitale, la contestation internationale au régime dictatorial érythréen.
« À coup sûr, fredonne toujours Thomas Pitiot, les coups de peinture n'effacent pas les fissures. » Écoutons pourtant la chanson qu'elles nous murmurent. Toutes ces belles histoires singulières ou communes. Mais aussi celles, plus dures, de l'injustice sociale. Douloureux requiems qui peinent souvent à franchir les murs.
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Publié par Pierre-Yves Bulteau le 06 Mai 2013