DOSSIER SEXE | Sex-shop : Entretien avec Richard Fhal, patron du réseau Concorde | Dossier |
À la boutique Concorde du 13e, l’accueil n’est pas des plus cordiaux. À croire que les sex-shops n’ont pas abandonné leur bonne vieille méfiance à l’égard de ceux qui posent des questions. Concorde est pourtant ce que l’on appelle maintenant un love-store, à la grande baie vitrée ouverte sur le boulevard de l’Hôpital et à l’éclairage au néon blanc façon grande surface. Rien à voir avec l’ancien sex-shop à papa, rideau de porte chenille, lumière tamisée et imper de rigueur. Le commerce du sexe s’est libéré, mais peut-être pas la parole. Qu’à cela ne tienne, puisqu’il faut bien parler de ce lieu pas commun dans le 13e arrondissement, appelons le big boss, Richard Fhal, grand manitou du commerce de produits érotiques et sexuels, patron du réseau Concorde et inventeur du concept de love-store.
Le 13 du Mois : Pourquoi avoir créé une enseigne dans le 13e, qui n’est pas vraiment un point chaud de la capitale ? Richard Fhal : J’avais l’idée de décentraliser le marché du sexe, de l’éloigner des classiques Pigalle et rue Saint-Denis afin de créer des sex-shops d’un genre nouveau, que j’ai appelés love-stores, parce que cela sonne doux et féminin. Un love-store doit se trouver dans un quartier ouvert et libre d’accès, où la femme ne se sent pas gênée par le regard des hommes. Le magasin du boulevard de l’Hôpital est le tout premier que j’ai monté en 2000. Comment est né ce concept de love-store ? À l’origine, et cela depuis quarante ans, Concorde est un grossiste qui fournit l’ensemble de la profession. Je connais donc bien le milieu des sex-shops qui étaient fréquentés à 98% par des hommes, les 2% restants étant des prostituées ou des femmes qui s’étaient trompées d’adresse. En revanche, la vente par correspondance bénéficiait d’une solide clientèle féminine. Je me suis dit qu’il y avait un marché à conquérir. J’ai alors créé mes propres boutiques. Depuis 2000, on est passé de quelques petits strings sexy à un tiers de lingerie sur l’ensemble de nos produits, et à une fréquentation composée à 60% de femmes, dont 30 à 40% viennent seules. J’ai également ouvert d’autres boutiques sur Paris et Strasbourg. Mais puisque les love-stores pullulent aujourd’hui un peu partout, vous êtes nombreux à vous partager le même gâteau... Quand j’ai créé cette boutique, j’étais loin d’imaginer qu’elle serait copiée par milliers. Pendant trente ans, il y avait seulement 300 sex-shops et deux sociétés de correspondance en France. Aujourd’hui, il y a en a respectivement 2 000 et 10 000. Moi qui pensais prendre une retraite royale, j’ai beaucoup plus de travail que quand j’avais 30 ans ! C’est un marché difficile, avec énormément de concurrence. Il faut savoir faire la différence, rester vigilant, sans cesse être à la pointe. Cependant, comme toute activité qui a connu un développement extrêmement facile et rapide, il y aura des pertes. D’ici 15 ans, beaucoup auront jeté l’éponge. Ce ne sera plus la ruée vers l’or et seuls quelques-uns resteront. [...] La suite dans Le 13 du Mois #23
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Publié par Virginie Tauzin le 12 Novembre 2012 |