PORTRAIT | AUDREN, LA FULGURANTE | Portrait |
Chacun de ses romans est un succès auprès du jeune public. Et il faut en compter une moyenne de trois à quatre par an. Insatiable, Audren est aussi chanteuse et réalisatrice. Mais qu’est-ce qui fait courir cette maman pétillante et la précipite dans des aventures adolescentes fantastiques ?
Un portrait sans dates, c’est une femme sans âge. Audren a un corps de jeune fille fuselé dans des vêtements noirs moulants des pieds au menton, rehaussé par quelques centimètres de talons. Des mitaines gothiques. Des boucles brunes bien coiffées. Une allure impeccablement soucieuse de ce qu’elle renvoie. Même pas la peine d’essayer de compter les années. Interdit. « Il n’y a que l’instant qui compte, je me fiche du passé. D’ailleurs ma fille m’appelle “l’instantanée”. » Quand elle sourit des lèvres et des yeux, elle parait très jeune. Il y a bien des souvenirs, de voyages, de sorties, de rencontres, oui mais quand ? « Je ne sais plus où je suis allée, je ne sais pas quand c’était », embrouille-t-elle. Petit caprice d’artiste, amusant. Audren est d’une drôlerie qu’on imagine irrésistible pour la plupart de ceux qui la croisent. Fraîche, généreuse, avec plein d’expressions qui lui traversent le visage et un côté légèrement perché. À la librairie Jonas, le 12 décembre dernier, elle a bien du mal à faire croire aux enfants de primaire venus la rencontrer autour de Bizarre bizarre, l’un de ses bouquins, que dans la boîte qu’elle apporte se trouve son chat invisible. Il n’y a guère qu’elle qui semble le voir. Près du grand sapin de Noël de sa maison aux volets bleus, quelque part dans le 13e, l’auteure a confectionné une petite assiette de viennoiseries. Audren, qui signifie « rivage » en breton, vit là depuis 15 ans avec son compagnon musicien et leurs deux filles. Il y a un piano à queue, un studio d’enregistrement au sous-sol, du velours pourpre sur les murs et un petit jardin silencieux derrière, comme un tout spacieux et bienveillant dédié à la création. « On est une famille bouillonnante », lance-t-elle. Plus prolifique tu meurs : depuis 1997, Audren a enregistré cinq albums de chansons et, depuis 2002, écrit une trentaines de livres, dont beaucoup ont obtenu des prix littéraires, avec un record de sept sorties rien qu’en 2007. Pour accompagner les viennoiseries, elle propose à ses invités de faire exceptionnellement du café, « mais moi, boire du café, jamais ! » Pas une affaire de goût mais de palpitations : elle n’a pas besoin de ça.
Un personnage qui se renouvelle chaque jourExcepté pour la musique, qu’elle chante par ailleurs en anglais d’une voix qu’elle définit elle-même de « black », son public, ce sont les jeunes. Les 6-10 ans pour les premières lectures ; les petits et grands ados pour les romans. « De la littérature pour tous en fait, définit-elle, avec plusieurs niveaux de lecture selon l’âge. » Aux élèves de primaire qui lui demandent si écrire était son rêve, elle répond : « Je n’en avais aucune envie, mais ça a marché. » Enfant du 14e arrondissement créative et rêveuse, voyageuse solitaire en Europe, au Canada et aux États-Unis avant même de passer son bac littéraire, Audren a étudié dans une école de danse et de théâtre à New-York, avant Londres, un premier disque soul-blues coréalisé avec son guitariste de compagnon, Chris Rime, et un gros succès, en 2000, pour l’interprétation de la chanson phare du jeu-vidéo Darkstone. À l’écouter, l’artiste s’est toujours arrangée pour avancer au gré des envies. « Je fais toujours ce que je veux, et ce que je veux, c’est de la poésie partout partout, et de la magie partout partout. » Au diable les habitudes, les repères, la répétition. Le personnage Audren se renouvelle chaque jour et son environnement avec. Ses seuls impératifs : être là à 7 heures quand ses filles se lèvent, et à midi quand elles rentrent déjeuner.
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Publié par Administrator le 10 Février 2014 |