13e Œil | Astier de Villatte, la céramique qui cartonne | 13e oeil |
Au 63-65 boulevard Masséna se cache la dernière fabrique de céramique de Paris. La PME Astier de Villatte y entretient des savoir-faire artisanaux avec l’aide d’une trentaine d’ouvriers tibétains. L’atelier se niche derrière une façade carrelée et découpée par d’épais tuyaux de béton. Sur 1 000 m2, des ouvriers s’affairent autour de plans de travail, dans un labyrinthe d’étagères métalliques chargées de tasses, d’assiettes, de bibelots gris ou émaillés de blanc. Nous sommes boulevard Masséna, côté impair, entre les portes d’Ivry et de Vitry, dans la dernière fabrique de céramique de Paris. Celle de la PME Astier de Villatte. Fondée en 1996, la marque est en vogue dans le segment du luxe. Les journaux vantent l’originalité de son univers « poétique et décalé ». Tokyo, New York, Londres ou Madrid sont tombés sous le charme de sa vaisselle à la fois rétro et branchée vendue au prix fort. En plus de sa petite boutique amirale de la rue Saint-Honoré, l’enseigne est présente dans plusieurs centaines de points de vente dans le monde entier. De quoi engranger un chiffre d’affaires annuel d’un peu plus de 4 millions d’euros. « Ils ont une grande capacité de concentration et sont cool » Les patrons, Benoît Astier de Villate et Ivan Péricoli, quadras souriants en jean-chemise de velours côtelé, s’attardent volontiers à raconter leur success story malgré un agenda de ministres : une rencontre aux Beaux-Arts, la fondation d’une PME avec la seule volonté de faire de beaux objets à l’ancienne, puis la mise en vente de quelques pièces. Le tout en suivant leur instinct, sans business plan ni catalogue. Et puis, un jour, George Lucas, le réalisateur de la saga Star Wars, réclame une tasse pour aller avec son service. Et la demande explose, forçant l’activité à se rationaliser. L’atelier, d’abord à Daumesnil, doit bientôt déménager faute de place. L’entreprise emploie aujourd’hui une cinquantaine de personnes, dont trente ouvriers. Presque tous sont tibétains, mais rien de prémédité. « Nous étions assez proches de la communauté tibétaine, se souvient Ivan. Le premier que nous avons embauché était très doué. Il nous a recommandé un de ses amis qui était encore meilleur. Ils ont toujours un copain à proposer, sourit-il. Immigrés pour des raisons économiques ou avec le statut de réfugiés politiques, les Tibétains étaient peu présents à Paris aux débuts de l’entreprise, mais depuis, leur nombre a explosé. Certains sont des moines bouddhistes. Peut-être la raison de leur compétence, avance Benoît « Ils ont appris à faire des gâteaux très fins à base de beurre, qui servent d’offrandes, explique-t-il en montrant une sculpture sur une étagère. Ils ont du coup une approche assez naturelle de l’artisanat, qui correspond à ce qu’on recherche. Et puis, peut-être encore grâce au bouddhisme, ils ont une grande capacité de concentration et sont très cool. » |
Publié par Jérôme HOFF le 05 Février 2015 |