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PORTRAIT | Milena Salvini et Isabelle Anna du Centre Mandapa

 

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Ballades en Kerala

 

Créé en octobre 1975 par Milena Salvini et Roger Filipuzzi, le Centre Mandapa fait résonner, depuis 38 ans dans le 13e arrondissement, les contes et musiques du Kerala. Détails d’une histoire hors norme avec ses deux actuelles directrices, Milena Salvini et sa fille Isabelle Anna.

 

Sans même avoir franchi la minuscule porte d’entrée, on la devine. Courge majestueuse, vernie et ornée de décorations typiques. Caressée par cet archet courbe, elle est l’instrument « bourdon », indispensable au bon déroulement d’un concert de musique classique indienne. La tampura et ses cordes, uniquement jouées à vide, accentuent la tonique et la quinte durant l’exécution du râg. Elle permet au chanteur d’obtenir tous les sons et les modulations possibles et de sublimer ses chants. En cette fin juin, les habitués se pressent au Centre Mandapa. Habitants du 13e ou de la couronne parisienne, pour rien au monde ils ne rateraient l’un des concerts si spécifiques à cet espace entièrement dédié à la promotion des arts du spectacle traditionnels et contemporains. Le monde et ses cultures y sont les invités permanents, tandis que l’Inde en est la clé de voûte.

L’aventure débute en octobre 1975, quand Milena Salvini et son mari Roger Filipuzzi tombent sur cet ancien laboratoire de radiologie, au 6 de la rue Wurtz. « C’était un hangar en ruine, se souvient la programmatrice, d’épaisses lunettes fumées vissées sur le regard. Mon mari est parti des fondations pour construire à neuf ce théâtre. Cela fera 38 ans en octobre. » La devanture confidentielle et son hall d’entrée ressemblent à s’y méprendre à ceux de ces salles paroissiales dédiées au théâtre ou au cinéma d’art et essai. Là aussi, l’accueil y est franc, décontracté. Après avoir acheté son billet, l’eau d’une bouilloire fumante n’attend que de tourbillonner dans une tasse de thé. Puis l’on perçoit, encore feutrée, bientôt de plein niveau, cette tampura entraînant l’harmonium hindou et la flûte bansuri. Les spectateurs sont lovés dans des gradins quasi pleins. Les mélopées s’envolent en ce 25 juin si particulier, douloureux même pour Milena Salvini et sa fille Isabelle Anna. Sur scène, le chanteur Pandit Shyam Sundar Goswami offre ses plus beaux récits. Ceux-là mêmes qu’il avait produits le 16 juin 2009, date du décès de Roger Filipuzzi. « Acousticien, c’est lui qui a fait en sorte que le plateau sonne aussi bien », poursuit sa femme. Faisant du Centre Mandapa un lieu réputé dans le monde entier chez les artistes du kathak et du kathakali, deux disciplines contées et dansées, parfaites synthèses de la tradition sacrée et séculière de la région du Kerala. Un État situé au sud-ouest de la péninsule indienne que Milena Salvini connaît bien pour l’avoir arpentée durant les années 1964-1965. « À l’origine, j’ai une formation de danse pantomime et puis, j’ai découvert la danse indienne qui résumait parfaitement mes envies. J’ai alors demandé une bourse d’études pour apprendre le kathakali, un théâtre dansé, conçu sur les bases de grandes épopées, qui avait la particularité de n’être dansé que par les hommes. »

 

Parmi les invités du Mandapa, le futur roi du Cambodge

En ce milieu des années 60 où l’Inde devient la martingale mystique de toute une génération d’Occidentaux, Milena Salvini est l’une des rares femmes étrangères à pouvoir assister à cet art séculaire.

[...]La suite dans Le 13 du Mois #32

Publié par Pierre-Yves Bulteau  le 12 Septembre 2013
 

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