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13e Oeil | REPORTAGE - Flics sans commissariat

 

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Reportage. Flics sans commisariats. Le 13 du mois, le magazine indépendant du 13e arrondissement Paris

Le 1er avril 2012, l’Hôtel de police du 13e arrondissement était ravagé par les flammes. Depuis, le commissariat est éclaté sur cinq sites différents. Pendant une semaine, nous avons voulu rendre compte de l’état des troupes en suivant l’unité de police administrative installée aux Olympiades. Voici leur quotidien, fait de débrouille et de missions étonnantes.

 

Le contact avec la petite brigade administrative du 13e débute avec un géant s’extirpant d’un bureau qui paraît sous-dimensionné. C’est Cyril, surnommé « 205 » par ses collègues en raison de ses 2,05 mètres. Il est à lui seul une métaphore de l’exiguïté dans laquelle se sont retrouvés les policiers quand leur commissariat a brûlé le 1er avril 2012.

Dispatchés dans cinq sites de fortune, les brigades du 13e attendent la réfection du commissariat en faisant avec les moyens du bord. Pour notre part, nous avons décidé de nous concentrer sur l’unité de police administrative (UPA) réinstallée sur la dalle des Olympiades, dans une petite vigie délaissée jusqu’alors. C’est le plus excentré parmi les sites réinvestis (pour le détail du redéploiement temporaire, lire l’interview du commissaire Serge Quilichini ci-après).

Là, six hommes se partagent une trentaine de mètres carrés. Jusqu’en septembre, il y avait deux collègues de plus. Chargées des dossiers d’expulsion locative, Stéphanie et Sandrine officient maintenant depuis le nouveau QG du 5e arrondissement, où sont également basés l’état major et les brigades de police secours. Un QG où les membres de l’UPA doivent désormais se rendre périodiquement pour des réunions ou récupérer un dossier, quitte à perdre «pas loin d’une journée ».

Sous le commandement d’Éric, le brigadier major, la troupe vaque à ses tâches administratives d’un genre très particulier. Nous qui venions avec l’idée d’éprouver leurs conditions de travail avons été surpris par la nature de leurs missions. Alors, le temps d’une semaine, nous en avons profité pour faire d’une pierre deux coups.

 

Des « bricarts » aux Olympiades

Éric est un ancien de la BAC 13, qu’il a dirigé avant d’intégrer l’UPA. Ici, il n’y a que des « bricarts » (brigadiers) ou des « cabots-chefs » (brigadiers-chefs), des policiers qui ont tous de la bouteille. Didier, proche de la retraite, a fait toute sa carrière dans le 13e notamment à la nuit, Pierrick est passé par les stups, le grand Cyril, sous-brigadier, a fait de l’administratif partout à Paris avant d’atterrir dans le 13e. Au planning affiché sur le mur s’ajoutent les noms de Philippe, plutôt invisible cette semaine de trêve des confiseurs, occupé qu’il était à des sessions de tir et autre formation de secourisme pour passer brigadier-chef, et de Stéphane, au repos.

Les Olympiades, Didier et Pierrick connaissaient bien. En particulier ses quelques loulous spécialisés dans le commerce de shit. Histoire de mettre les choses au clair, ils sont d’ailleurs allés voir l’un d’entre eux, un grand frère plus ou moins rangé auquel ils ont eu affaire par le passé. « On lui a dit qu’on n’était pas là pour lui et ses copains et qu’ils nous laissent tranquilles », raconte Pierrick, qui y a lui-même fait des planques du temps où il était aux stups. Une façon de désamorcer toute animosité pour ces flics qui travaillent en civil - « Ça change les rapports. Les gens sont déstabilisés, plus à l’écoute », selon Cyril - et dont les missions sont finalement très peu répressives.

Une police qui ne réprime pas

On s’occupe à l’UPA d’une foule de choses totalement méconnues. Le renouvellement des permis de port d’armes, c’est ici. En voyant les dossiers s’empiler sur les étagères, on s’aperçoit que les possesseurs d’armes ne sont pas rares dans le 13e - « certains en possèdent plus d’une dizaine », nous dira Éric, le chef. Il nous parlera également des aliénés, qu’ils vont voir en cas de problème quand, par manque de lits d’hôpitaux et après avoir été gavés de médicaments, ils se retrouvent livrés à eux-mêmes une fois de retour au bercail. Ces policiers sont aussi en charge d’une variété d’enquêtes de voisinage et de moralité. Notamment pour des demandes de visite en prison ou, à l’inverse, pour s’assurer que ceux qui bénéficient d’une mise en liberté conditionnelle sortent dans de bonnes conditions. Il y a aussi les mariages « franco-étrangers » : ce sont les membres de l’UPA qui vont en effet s’assurer que les époux convolent en justes noces, quitte à vérifier l’état de leurs draps.

Cette liste n’est pas exhaustive. Elle suffit pour donner à voir l’étendue des missions d’un groupe qui bénéficie d’une large indépendance d’action. L’UPA se voit comme un service public à part entière. On n’y prend pas de plainte, on ne s’occupe pas de répression - « jouer à saute-dessus, ça va un moment. Au moins en police administrative, tu vois les résultats », nous dira-t-on. Et comme tout service public qui se respecte en ces temps de disette, ses membres ont une vision assez amère du métier, à laquelle s’ajoute le contexte de l’incendie.

 

Routine et débrouille

« On a autant de dossiers qu’avant pour deux fois moins d’effectifs », s’énerve Éric avant de montrer quatre bureaux encombrés, placés en vis-à-vis : «Ici, on est susceptible de recevoir chacun une personne, on fait comment ? Tout ce qui a été installé ici, c’est nous qui nous en sommes occupés, quitte à y mettre de nos propres deniers. On paie le papier cul, la Salpêtrière nous fournit du savon pour nos missions auprès des aliénés, tout est comme ça!»

 

[...] Lire la suite dans Le 13 du Mois #25

Pour compléter ce reportage, vous trouverez en prime une interview du commissaire du 13e Serge Quilichini.

 

A lire aussi :

- COMMICO - Le récit d'un flic après l'incendie du commissariat

Publié par Jérémie Potée  le 15 Janvier 2013
 

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